08 mars 1990. C'est ce jour, que ma vie a prit un tournant décisif. J'étais un nourrisson, et je devais mourir dans les minutes à suivre. Les ruelles de Hong Kong sont encore très froides, la nuit, à cette période de l'année. Je pleurais à plein poumons, je ne devais pas avoir plus de quelques jours, semaines tout au plus. Pourtant, je devais déjà mourir. Quelques minutes de plus auraient suffit. Cependant, j'ai crié assez fort pour me sauver la vie. J'avais été abandonné à l'arrière d'une rue à mauvaises fréquentations, près de la porte de secours d'un club de jeu. L'homme qui m'a trouvé sortait pour fumer, mais j'étais là, et j'ai changé sa vie autant qu'il a changé la mienne.

Il a eut pitié, il m'a recueillit, ainsi que son frère. Ils sont devenus ma famille. Comme ils ne savaient rien de moi, ils ont décidés de prendre ce jour comme celui de ma date de naissance, puis ils m'ont trouvé un nom: Xiao Long, ou Petit Dragon, dans votre langue. Je m'étais battus pour survivre dans le froid, et d'après le médecin qui m'a ensuite ausculté, j'y étais déjà depuis un petit moment.  

Ils m'ont ramenés chez eux, dans une grande maison traditionnelle de Hong Kong, où ils vivaient avec leurs frères mafieux. C'est une grande famille, c'est ce qu'ils m'ont dit. Grâce à eux, j'ai bien grandit. Mon enfance me semblait des plus banales et pourtant, elle ne l'était pas vraiment. Je n'avais pas de jeux vidéos, pas de télévisions et je n'allais pas à l'école. J'avais quelques camarades de mon âge et nous étions toujours ensemble. L'école était faites à la villa. Le matin, nous apprenions les matières classiques et l'après-midi, c'était sport de combat. J'ai ainsi appris le karaté, la boxe, le judo et d'autres encore. Avec mes pères, j'ai appris à manier les armes blanches et à feu. À dix ans, déjà, ils m'emmenaient sur les exécutions qu'on leur commandait. J'ai vu mes Pères abattre un homme de sang froid et pour moi, à cet âge-là, c'était la chose la plus cool au monde.

Lorsque j'ai eut 12 ans, ils m'ont offert ma propre arme et le chef a ordonné que j'aille tuer un homme qu'il disait gênant. J'étais fier. Pour moi, c'était une preuve que j'étais bon, digne de confiance. Je l'ai fais, sans sourciller, sans même une once de peur. Ils ont fait de moi une arme. Un robot, prêt à tuer.

À partir de ce jour, j'ai eut le droit d'aller au collège du quartier. C'était étrange, ces gens me paraissaient dénués d'intérêt, puérils et stupides. Ils parlaient sans cesse de gens que je ne connaissais pas, et de sport qui n'avait pour moi, aucune logique. Cependant, je me suis quand même fais quelques amis, et c'est grâce à eux, que j'ai découvert la musique. Ce fut comme une révélation, c'était ce que je voulais faire.

J'ai commencé à sortir au karaoke avec eux, et j'appris ainsi à travailler ma voix, qui n'était pas si mauvaise. C'était un exutoire pour moi et je me sentais libre pour la première fois de ma vie. Vider mon stress sans avoir besoin de tuer. C'était magique. Un nouveau monde s'ouvrait à moi. Evidemment, je n'en ai pas parlé à mes Pères, je savais qu'il était impossible de sortir du monde dans lequel je vivais et puis, je n'en avais pas vraiment envie. Tout ce que je voulais, c'était un loisir.

Finalement, lorsque j'eut terminé le collège, je pris mon courage à deux mains. J'ai annoncé à mes Pères que je voulais entrer dans une école de musique, j'ai promis de continuer mes activités familiales, et ils ont acceptés après l'approbation du Chef.

Lorsqu'à 16 ans, j'ai passé les portes de cette grande école, j'avais l'impression d'être le maître du monde. J'ai changé, tant physiquement que mentalement. Je me suis intéressé à la mode, j'en ai fais un loisir également. Je jouais de mes cheveux comme d'un accessoire. Je vous avouerais qu'à la première coloration blonde, mes Pères ont tirés la tronche et puis, le Chef a dit que tant que ça ne nuisait pas à mes missions, ça ne dérangeait pas.

Tout allait bien. Ma vie me semblait parfaite. Seulement, tout à toujours une fin. L'année de mes 19 ans, fut l'année du changement. J'ai perdu mes parents, ceux qui avaient tant fait pour moi, ceux qui m'avait sauvé d'une mort certaine et donné une vie qui, bien qu'atypique, me plaisait. Une mission, une bande, plus nombreuses et mieux équipés. Tous les deux y sont restés. Je n'ai pas eut le temps de m'apitoyer, dans la mafia on ne pleure pas les hommes perdus, on les félicitent pour leurs actions. Alors j'ai souris, je me suis incliné et j'ai écouté ce que le chef avait à me dire. Je n'assisterais pas aux funérailles. Je partais le lendemain pour la Corée du Sud où il avait déjà envoyés quelques hommes. Là-bas, j'allais gagner un rang dans la Mafia grâce à mon apprentissage sans faille. Je n'avais pas droit à l'erreur, peu de gens de mon âge avait droit à ce rang, et surtout, il était rare que la Mafia coréenne accepte un membre Chinois dans ses rangs. "Tu n'as pas droit à l'erreur Xiao Long. Si tu te trompes, alors tu mourras."

Le visage sans aucune émotion, le regard dur, j'ai accepté. Je me suis agenouillé devant celui qui était mon supérieur puis me suis relevé et ai quitté la pièce sans un regard en arrière. Je n'avais jamais pris conscience d'avoir eut un traitement particulier, mais il est vrai que même les plus vieux me craignaient.

Je suis donc à Séoul depuis bientôt 4 ans. J'ai appris la langue, bien que j'ai encore quelques lacunes, et me suis fait une place dans la capitale. Ma nouvelle famille est contente de moi et mon rang me permet de vivre seul, dans mon propre appartement, sans eux, sans tuteur. Bien sûr, au début ils étaient méfiants mais désormais, ils trouvent que j'ai suffisamment fais mes preuves. Je suis un grand garçon.

J'ai la tête pleine de rêve de gloire, le corps recouvert d'une marque qui suffirait à ma condamnation à mort au moindre faux pas, les mains couvertes de sang et une voix en or que seul le trottoir semble entendre. Je suis Ge Xiao Long, le Petit Dragon, l'étranger venu de Chine, le délinquant drogué et le chanteur de rue. Je suis un tueur sans pitié et pourtant, croyez-moi, je rêverais d'une vie calme et emplie de douceur. Seulement, je suis réaliste. Je vis dans un monde dont on ne sort que les pieds en avant.