Min Seok avait, malgré tout, le goût pour ce genre de soirée. Il y avait là du monde qu’il connaissait bien et s’il n’appréciait pas toutes les célébrités de la finance et de la politique présente, il avait néanmoins des affinités avec nombre d’entre elles et c’était toujours l’occasion de recroiser quelques connaissances qu’on appréciait mais qu’on n’invitait pas forcément tous les dimanches autours d’un bon repas, quoi. Accompagné ce soir de son fils aîné, ce dernier devait vagabonder un peu plus loin, s’occupant de son côté pendant que lui-même, proche d’une peinture style renaissance, se perdait un peu dans sa contemplation.
Non, Min Seok n’avait jamais été particulièrement un homme d’art. Il est probable qu’il n’aurait pu citer que quelques grands peintres et quelques œuvres associées… Mais si l’art était cette dimension qu’on voulait inaccessible aux néophytes (et aux petites bourses) il était néanmoins le régal des yeux de tous, la majeur partie du temps. La majeur partie parce qu’il fallait admettre que quelques artistes le laissaient plus dubitatif et prudent. Un peu plus tôt, par exemple, il avait approché de l’art moderne. Il avait trouvé ça… intéressant, au mieux… Mais pas aussi attractif que ces drapés d’époque et ces femmes qui bien en chair représentait une sensualité brute et cette force intérieure qui n’appartenait qu’aux femmes, reines de leur ménage, avec les épaules assez larges pour porter époux et enfant après l’épreuve de l’accouchement. Dommage que la sienne n’ait pas été si inspirée… Bref.
Cette section avait donc sa préférence. Ce n’était sûrement pas passé inaperçu et Min Seok s’attendait un peu à ce qu’on vienne le démarcher afin qu’il fasse une généreuse donation à l’université. Avoir son nom sur une plaque ne l’intéressait pas spécialement mais avec son cadet qui passait la moitié de son temps à dessiner et l’autre à jouer de la musique, il se sentait un peu obligé d’y ajouter un coup de pouce tout paternel pour assurer à son bébé une place dorée dans cette université d’art prestigieuse. Ca valait sûrement qu’on signe un chèque et ses enfants n’avaient jamais été dupes sur le sujet. C’était malheureusement comme ça que le monde marchait, même quand on avait du talent.
L’attention de Min Seok est attirée ailleurs que sur le tableau face à lui… Et un sourire se peint sur ses lèvres en voyant un vieil ami. La surprise, par contre, vient de la superbe jeune femme à son bras qui ne lui était bien sûr pas inconnu puisqu’ils s’étaient déjà vus… En France ! A croire que ce pays lui avait valu bien des rencontres intéressantes puisque sans ça, il n’aurait pas mit quelques billes (puis presque tout le sac de bille) dans le magasine du Velvet Dust. Sae Ra, donc. La fille de Park, vu ce qu’elle venait de dire. C’était un peu gênant… Parce qu’au bel été, sur un bateau mouche, peut être avaient-ils profité de la ville de l’amour pour flirter un peu. Rien que du très retenu, il aimait courtiser et prenait plus de plaisir à cueillir les fleurs qui se coupaient la tige d’elles-mêmes.
Avec doigté, la jeune femme envoi son père un peu plus loin avant de lui faire parvenir une coupe de champagne entre les mains. Min Seok lève les yeux au ciel à ce qu’elle lui dit, constatant :
◘ Ca je doute que ce soit ta mère qui te l’ai apprit.
Cela faisait un moment qu’ils ne s’étaient pas vu mais ils s’étaient quittés sur du tutoiement alors il pouvait, n’est-ce pas ? De toute façon, Sae Ra en faisait de même, superbe dans son attitude sûre d’elle, exposant sa jeunesse et sa silhouette longiligne dans une tenue peu orthodoxe pour ce genre de soirée. D’accord, il préférait les femmes en jupe ou en robe. Il exaltait d’elles une féminité qui sentait bon le printemps, en quelques sortes… Mais il était loin de détestait le sens esthétique de la jeune femme auquel il avait déjà pu goûter au temps de Paris.
Elle s’intéresse à ce qu’il fait là et vu le tempérament de la jeune femme il ne tente même pas de la lui faire à l’envers !
◘ Min Ki se verrait bien dans cette université à la fin du lycée.
Mais d’admettre, dans la foulée, tout en présentant le tableau près d’eux de sa main tenant sa coupe de champagne.
◘ J’aime ce tableau. Si je savais où mettre un tel hommage aux belles femmes chez moi, j’en aurais sûrement déjà un. A cette époque, on savait que la beauté ne s’encombrait pas de coupe-faim. Paradoxal que je fasse l’apologie de cette mode sachant d’où je tire la principale source de mes revenus, je sais.
Il a un petit clin d’œil pour la jeune femme à son tour, prenant une gorgée de son champagne, demandant :
◘ Ca fait longtemps que tu es revenue en Corée ? J’ignorais qui était ton père. Nous sommes bons amis.
C’était un peu perturbant, de fait ! Et comme il venait de parler de ses revenus, Sae Ra se fait curieuse sur le sujet, toujours avec une pointe de subtilité féminine et Min Seok explique brièvement :
◘ Je suis actionnaire. Principalement chez Velvet Dust, le magasine de mode, chez qui je suis majoritaire. Te connaissant, je soupçonne que tu saches de quoi il s’agit.
Petite boutade parce qu’il lui semblait bien se souvenir que Sae Ra était une mordue de mode oui !
◘ Et toi ? Toujours dans la photographie ?
Hé bien quoi ? Il se souvenait oui !