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so hee & sid

La journée de So Hee ne commence autrement que par un café. Le réveil peut sonner, la main de la belle a beau se manifester pour l'éteindre et son corps s'animer, une journée sans café n'est rien de plus qu'une misérable, que dis-je, une pâle copie d'une vraie journée. 10% de présence, 5% d’intérêt pour ce qui se passe autour d'elle, 20% de sourire sur commande et 25% de ... Comment pourrait-on appeler ce caractère grognon et si détestable hn ? Caractère de chien mouillé fera sans doute l'affaire ; c'est tout dire en trois mots et ne rien dévoiler pour autant. Parce que quand je dis, caractère de chien mouillé mes amis, ce n'est pas une plaisanterie. Non non non, c'est bien loin de votre imagination, très très loin même. La jeune femme s'est réveillée depuis une bonne dizaines de minutes ; elle a eu le temps de prendre une douche, allumer une cigarette, regarder les infos sans beaucoup d'intérêt pour ne pas dire absolument pas et enfiler une simple robe noire, des talons, sa veste en jean et une écharpe turquoise. Elle ne sait pas vraiment comment elle a fini par arriver à l'agence, mais en tous cas elle n'est pas venue en voiture par elle même -parce qu'elle aurait eu la mort de plusieurs personnes sur la conscience sinon. C'est sans doute une âme charitable qui a bien voulu faire un détour chez elle parce que jamais de la vie elle ne serait montée dans un taxi aussi tôt le matin.

Ah triste journée pour mademoiselle Han, la rupture a toujours quelque chose de difficile dans le sens où elle s'attache toujours trop. Elle a terriblement peur des personnes qui partent, elle ne le supporte pas. Mais alors avec Sid... Sid, Sid, Sid : mademoiselle a gagné le jackpot. Il lui a sorti cette phrase tellement cliché et elle aurait voulu lui dire, elle aurait tellement voulu lui dire "bébé... s'il te plait, tais toi ! t'essouffle pas j'ai compris" mais non, elle n'a même pas eu la force d'ouvrir la bouche la so hee, parce que cette situation, elle ne l'avait pas vu venir du tout. Mais elle en a ouvert des paquets de mouchoirs, son système immunitaire en béton... Réellement en béton cette fois ci l'aura au moins empêché de passer par la case "je suis balade, bonjour !" Ah, vraiment, elle ne comprend pas comment ça a pu arriver. Il était tellement compréhensif pourtant, c'est comme si elle avait eu l'impression de lui avoir déjà parlé auparavant. Quoi qu'il en soit, elle a séché ses larmes depuis une bonne semaine maintenant, et si vous vous posez la question, non elle n'est pas passée par la case "crème glacée et film trop cute". Elle a juste ouvert des paquets de mouchoirs et écouté des musiques déprimantes et ... Et aussi regardé le Titanic, j'avais zappé ce détail.

Et bon sang ! elle a pensé, plus de Jack dans le monde actuel, plus de Jack pour empêcher sa Rose de tomber. Plus de putain de Jack, c'est terminé tout ça, elle ne peut plus espérer en voir un sur terre, même si elle faisait le tour du monde. Les mecs sont beaucoup trop cons de toute façon elle s'est dit. Oui, c'est de cette façon que So Hee a séché ses larmes pour revenir à la vie active, bien qu'elle n'ait pas vraiment eu le temps de freiner hn... Il est presque neuf heures du matin, et elle n'a toujours pas eu son précieux café. Elle tuerait pour l'avoir ce café... Elle tuerait dans... son imagination... une peluche peut être. Descendant les escaliers un peu plus vite que ce matin pour se diriger vers son éternel dealer de bonne humeur, elle retrouve alors une once d'humanité une fraction de seconde, dans un simple sourire lorsqu'elle voit son stand. Oh yes yes yes elle se dit dans sa tête en fermant les yeux quelques secondes, profitant de cette odeur de caféine flottant dans le périmètre il est toujours là même si j'ai passé une semaine à carburer au café de la maison. Elle arrive alors finalement vers le stand et lui offre alors un sourire avant de lui dire ;


So Hee - Ça faisait longtemps hn, non je n'ai pas déserté~~ elle rit doucement si tu n'as pas oublié, je vais prendre la même chose que d'habitude elle dit distraitement en cherchant son paquet de cigarettes dans son sac


Ah So Hee, So Hee, ce café va avoir du bon...

Le paresseux n’avait pas assez de force pour se dépêtrer de ses draps, non, rectification : il ne voulait clairement pas se bouger pour aller au travail. Faire acte de présence en cours sans pour autant le suivre, c’est un principe. Mais faire acte de présence au travail… sachant qu’il a un travail pourri… c’est pas tout à fait un principe. Depuis une bonne vingtaine de minutes il roulait dans son lit sans avoir le courage de poser ses fichus pieds par terre. Fainéant, il l’a toujours été : il n’a jamais nié qu’être dessinateur, c’est principalement parce que ça demande pas trop d’efforts – faut être créatif et avoir du papier et un crayon. Alors que vendeur de café ambulant, il faut se rendre sur le lieu de travail, déambuler avec un chariot, faire du café… Son téléphone vibra, un nouveau sms lui était envoyé. La tête dans son oreiller, du coin de l’œil il lut en diagonale le texto mais se releva brusquement quand l’information atteignit son cerveau. Son patron venait de lui dire qu’il n'avait pas à travailler les deux autres jours de la semaine – ce qui voulait dire qu’il ne devrait travailler qu’aujourd’hui. Le patron avait précisé la raison de ce changement mais Sid était trop surexcité pour y faire attention. Criant presque de joie, il quitta finalement son lit et s’engouffra dans la salle de bain pour devenir Ju An – plus communément connu comme Juanito le moustachu. Après sa douche et son brossage de dents habituels, il commença la transformation en Juanito. Moustache collée, perruque bouclée vissée sur son crâne, vêtements ringards sur lui ainsi qu’un tablier blanc représentant une moustache noire, et il était fin prêt. Il n’oublia pas de prendre son téléphone ainsi qu’une veste et son éternel paquet de chewing-gum – Juan ne travaillait jamais sans ses chewing-gums ! Principalement parce que ça lui donne une voix étrange – irritante –, tout est bon à prendre pour passer inaperçu dans cette boîte.

Quand il finit par arriver dans l’immeuble du magazine, il présenta son pass à l’accueil et se dirigea vers la cafétéria pour prendre son adorable chariot décoré de moustaches. En sifflotant un air de Gainsbourg, il roula la marchandise pendant que l’eau chauffait et prit l’ascenseur en direction du premier étage. C’est plutôt calme, ce matin-là – sans doute l’effervescence autour d’une nouvelle parution, d’où l’absence de pause-café pour la plupart. Avec un sourire, il prépara machinalement le café de sa demi-sœur, un peu triste de ne pas la voir arriver avec son joli sourire et ses nombreuses plaintes sur tout et tout le monde. Sur le moment, il se senti comme un espion sous cette identité bidon et cet accoutrement ridicule ; mais c’était la seule façon qu’il avait de rencontrer ses sœurs sans être dévasté par un quelconque rejet. Ses lèvres se pincèrent, quand il songea à une autre personne à qui il avait fait le même coup. Et dire qu’il refusait d’être un connard fini avec les filles, vu la façon dont il a rompu avec So Hee, il était exactement ce genre de types. En chassant ces idées de sa tête, après tout ce qui était fait était fait, il mit un autre chewing-gum dans sa bouche et fit de grosses bulles pour s’occuper. Mais son ennui se termina rapidement quand il aperçut une certaine personne qu’il connaissait parfaitement bien et qui voulait certainement le tuer. En bref, Han So Hee fit son apparition comme un ange tombé du ciel dans une pub de déodorant. Nerveux, Sid, ou plutôt Juanito songea à se cacher à l’intérieur de son chariot mais trop tard, elle se dirigeait déjà vers le stand. Sourire magnifique sur le visage, il avala durement sa salive à la vue de ses longues jambes. Et dire qu’une semaine plus tôt, ils sortaient ensemble. Quel crétin, franchement. « Ça faisait longtemps hn, non je n'ai pas déserté. » Dit-elle en s’approchant – il aurait clairement préféré qu’elle déserte plutôt que de subir cette culpabilité et de la supplier pour qu'elle le reprenne. C’est qu’il regrettait sa bourde, surtout que ça avait bien collé entre eux. Il hocha la tête pour faire professionnel, avec un petit sourire caché derrière la moustache. « Si tu n'as pas oublié, je vais prendre la même chose que d'habitude. » Il se tripota la moustache quelques secondes, à cause de sa nervosité parce qu’il avait oublié le café qu’elle avait l’habitude de prendre tellement il était nerveux qu’elle fasse le lien entre Juanito et Sid. Il se racla la gorge en faisant chauffer de nouveau l’eau et prit une tasse. « Café viennois, non ? Désolé, avec tous les gens qui viennent, Juanito a oublié… » dit-il avec un sourire d’excuse, même nerveux il n’oubliait pas le détail : parler de lui (Ju An) à la troisième personne. « Sucre ? » Il mit tout de même un sachet de café normal dans la tasse mais attendit le feu-vert pour le sucre. « Dure matinée ? » Ju An l’avait tellement habituée à prendre de ses nouvelles que ça serait louche qu’il n’en prenne pas même après leur rupture ; sauf que Sid aurait préféré ne pas parler et prendre ses jambes à son cou.

Un hochement de tête en guise de réponse à ses questions et Juanito se remit au travail. Tout du moins, il essaya, parce qu’il était encore nerveux – surtout qu’il avait toujours trouvé So Hee particulièrement attirante avec une cigarette alors ça le perturbait un tantinet. « Tu dois avoir une sacré mémoire... Pour t'y retrouver au milieu de tout ça et te souvenir de ma commande. Non parce que moi, je me souviens à peine de l'endroit où j'ai pu mettre mon briquet ce matin. » Ah, ça oui, il en a une très bonne ; ce n’est pas une bonne qualité parce que ça le rend sournois et calculateur. Après tout, c’est de cette façon qu’il a réussi à faire craquer Sohee. Il se réconforte toujours en se disant qu’il n’est pas mauvais, ni un joueur, qu’il use simplement de quelques subterfuges pour parvenir à ses fins. Il se contenta de répondre par les onomatopées habituelles, comme « oh », « ah », « uh ». « Dis Ju An, tu n'aurais pas un briquet par hasard ? Je ne me souviens pas t'avoir déjà vu fumer mais, il fallait que je tente le coup hn. » Sa question balaye les réflexions qui lui traversaient l’esprit et machinalement, il sortit le briquet de sa poche et le tendit à So Hee. « Juanito fume pas beaucoup mais ça lui arrive. » Il ajouta une cuillère de sucre dans la tasse et versa l’eau chaude. Tandis qu’il écoutait les réponses de Sohee, attentif, hochant la tête de temps en temps à ses remarques. « Juanito tu y comprends quelque chose toi aux hommes ? Enfin, ce n'est pas comme si tu t'étais engagé dans une relation avec un homme... Si ? Oh pourquoi je pose ces questions ?... » À ces questions, Ju An se retint de cracher son chewing-gum tellement il était surpris et choqué mais d’un autre côté il comprenait où elle voulait en venir. Et il n’était pas narcissique ou égocentrique mais il était persuadé que la belle parlait de lui, Sid. Il rit brièvement et haussa les épaules sans même répondre par onomatopées, il se contenta de touiller le café. « C'est vraiment difficile... Mais le point positif c'est que je vais pouvoir me reposer aujourd'hui plus que les autres jours. » Une moue compatissante alors qu’intérieurement il se maudissait sur plusieurs générations d’avoir largué Sohee. Mais il se concentra sur le café pour ne pas être démasqué aussi rapidement, même s’il l’écoutait toujours attentivement. « Et je crois que j'en ai vraiment besoin, d'heures de sommeil en plus, de vacances et encore de vacances... Et si je pouvais, j'irai en Italie... Je ne sais pas pourquoi mais j'aimerais vraiment y aller en dehors du boulot, la langue est belle et ça me changerait un peu... » « Ah ? » Retour à l'onomatopée alors que ses mains étaient occupées à faire du café. Sa touche spéciale, c’est la larme de lait qu’il ajouta dans le café avant d’attraper la crème chantilly pour la secouer. Ceci étant fait, il remplit le reste de la tasse par la crème allégée, saupoudra celle-ci par une pincée de cacao et de morceaux de caramel. « D'ailleurs en parlant de changement... C'est un miracle que mon manager ne soit pas sur mon dos à l'heure actuelle.. Dis Ju An, tu as pensé à des vacances toi aussi ? » Avec une serviette et une petite cuillère en plastique, il tendit le tout à l’égérie. Mais il eut un temps d’arrêt, So Hee avait posé ses coudes sur une des barres du chariot et elle était vraiment trop près de lui. Elle pourrait à tout moment voir sa fausse moustache ! Ou pire, constater que sa perruque est de travers… Avec un self-control extraordinaire, Ju An ne laissa rien transparaître et lui fit l’habituel sourire moustachu avant de répondre : « Vacances ? Moi ? Pour Juanito, c’est constamment les vacances ! Je vous conseille le sud de l’Italie, il y a de véritables coins paradisiaques et ils font de très bonnes pâtes, si jamais votre manager vous y autorise…Ah ! Monsieur, que puis-je pour vous ? » Ah, il était doué pour passer à autre chose. Avec un sourire d’excuse, il montra le banquet en face à Sohee pour qu’elle s’y installe et boive son café tandis qu’il s’occupait d’un autre client. « Juanito sera à vous dans un instant, pour parler Italie. » Ajouta-t-il à l’intention de l’égérie avec un clin d’œil même si en vérité, il voulait surtout s’occuper des autres pour que le manager de Sohee vienne la chercher. L’éviter ? Lui ? Non, bien sûr que non ! Il voulait juste prendre son chariot et courir, c’est tout.

Alors occupé avec deux clients, il ne se rendait pas compte qu’à quelques mètres un volcan était en voie d’éruption. Souriant et carrément confiant, il était persuadé qu’elle ne ferait pas le rapprochement concernant sa (fausse) personnalité extravagante. « Cappuccino, comme d’habitude ? » Demanda-il à un nouveau client alors que les deux autres payaient leur part et s’en allaient. Du coin de l’œil, il la vit boire son café, songeuse. Sans doute une façon de se préparer à un nouveau défilé ? Chacun son truc. Après tout, tout le monde semblait occupé aujourd’hui, il devait se passer quelque chose d’important mais comme il s’en fichait un peu… « Navré, j’ai mis trop de sucre ! » Zut, il était tellement préoccupé par sa première cliente de la journée qu’il était totalement déconcentré dans son boulot ! Le client semblait grognant qui plus est, à pincer des lèvres à chacune de ses bêtises. Non seulement il avait mis trop de sucre mais en plus il s’était trompé de café, vraiment inadmissible pour un vendeur de café qui se targuait d’être spécialiste en café. Mais il se rattrapa à temps. Ou pas. Car le client ne cessait de grogner, en faisant une moue comme si quelqu’un avait lâché une caisse sous son nez. Il sentit son café et une nouvelle grimace apparut. « Bon, tu le bois ce fichu café ou je te le mets là où je pense ? »… Oups. Il n’avait pas pu s’empêcher. À coup sûr, ça sera un nouvel incident qui sera répertorié dans son cahier – son patron n’allait pas apprécier du tout. En grognant dans sa barbe, le client laissa la tasse et repartit le nez en l’air à la manière des bourgeois français. Sid entendit quelques « inadmissible », « plaindre » venant du type mais n’en fit pas attention. Un nouveau coup d’œil vers les bancs à gauche et il vit So Hee fixer un objet dans ses mains. En haussant les épaules, il passa un coup d’éponge sur le chariot en attendant d’autres clients. Sauf qu’aucun client ne vint le voir. « SALAUD ! » Oh oh, ça sentait le roussi. Il tourna brusquement la tête vers l’origine du cri et fit face à une So Hee hystérique. Sur le moment, elle ressemblait à une harpie et les harpies, c’est très dangereux comme bestioles. « Juanito sera à vous dans un instant pour parler Italie hn ? Espèce d'escroc ! » Oh, non… Oh, non ! Elle l’avait pas découvert, si ? Il déglutit difficilement et se prit un gobelet vide sur la gueule. « Attends, attends reste à ta place, reste là, j'arrive tout de suite ! Comment est-ce que tu as pu me faire ça espèce d'ordure, comment est-ce que tu as pu ?! » Bon, elle l’avait découvert. Une semaine que ça avait marché, une semaine. Il était fichu, totalement fichu. Il eut même envie de jouer les ignorants en faisant comme s’il ne savait absolument pas de quoi elle parlait mais ça serait du foutage de gueule et il s’était déjà assez foutu de sa gueule ; elle méritait au moins sa franchise. « Non, non, attends, je vais t’expliquer… C’est pas ce que tu crois ! Je t’assure, je me suis pas foutu de toi, je voulais juste pas que tu découvres ça. » Le ça, c’était son accoutrement, son métier totalement fake, et sa fausse identité. Mais au lieu de continuer sur sa lancée, il vit une silhouette au fond du couloir et fit rouler le chariot en contre-sens. « Viens ! » Parce qu’il voulait bien lui révéler la vérité mais il ne fallait pas le faire avec des témoins aux alentours, ça paraîtrait trop louche. Sid laissa le chariot dans le couloir et entra dans une pièce vide, attendant que Sohee entre à son tour. Ou qu’elle n’entre pas, il était prêt à lui courir après dans tout le magazine pour finir ses explications de toute façon.